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Les chaînes d'angle : en granite, en gneiss (suite)

Parfois, des chaînages Chaînage Chaînage maçonné
La chaîne est une pile en pierres de taille, en pierres choisies ou en briques, incorporée dans un mur pour l'affermir par boutisses et panneresses. Une pile construite aux angles d'une maison s'appelle chaîne d'angle.
plats, crans d’arrêt ou chandelles, stabilisent de larges murs fragilisés par leur appareil. Ils sont incorporés à la maçonnerie. Leurs pierres taillées et croisées raidissent la construction.

D’une encoignure à l’autre, un cordeau est tendu : il indique la hauteur de la nouvelle rangée que les maçons limousineront aussitôt "à plein mur" selon l’appareillage possible.

Les encoignures, taillées rigoureusement, sont le plus souvent taillées à joints vifs. Les arrêtes du lit de pose épousent étroitement les arêtes inférieures en attente et la mise en place de l’angle saillant est assurée par l’oeil. La verticalité de l’ensemble est vérifiée au fil à plomb.

Toutes les pierres de taille peuvent aussi être posées "à bain de mortier", surtout si les faces d’attente et de pose sont seulement dégrossies. Un mortier de chaux et de sable très fin, étalé sur le lit d’attente, est écrasé jusqu’à reflux par le poids supérieur.




Pour quelques grandes maisons de maître, les pierres d’angle en grand ou moyen appareil, posées sur de fines cales de bois, ont leurs joints remplis par un coulis ou bien par un mortier poussé à la "langue de chat crocodile".


Même dans les pays limousins de roche métamorphique, il faut monter des chaînes d’angle aux maisons et aux granges ! Or, gneiss et micaschistes sont feuilletés. À cette pierre qui se délite et qu’on ne peut trancher manuellement, on ne peut imposer ni arrête continue ni parement vertical d’ampleur suffisante. Les maçons se conforment donc avec obéissance aux volontés géologiques.


Télécharger la notice (avec schémas cotés) sur les encadrements en bois des portes et fenêtres
(pdf de 1,1 Mo)  



Pour les embrasures de baies, c’est le charpentier qui contient les murs par un double encadrement de bois, l’extérieur et l’intérieur étant reliés entre eux.


Pour les chaînes d’angle et les entrées charretières de granges, seule la pierre convient mais c’est elle qui dicte sa loi. Main, oeil et intelligence mettent en oeuvre une nouvelle logique : il faut faire avec ce qui est là.

L’encoignure ne peut être taillée ; elle peut seulement être retouchée au marteau tout au plus. Elle est d’abord triée et mise à part par un manoeuvre qui visite le tas d’approvisionnement. Elle est volumineuse et longue, peut se poser sur son lit de carrière et possède une possibilité d’angle. Sa finition sera effectuée sur l’échafaudage par le maçon, en fonction de l’encoignure précédente qu’elle va venir croiser.

Le maçon saisit la pierre choisie et la pose sur un sac plié. Il a retenu le point angulaire de la face en boutisse Boutisse Boutisse
Pierre dont la plus grande longueur pénètre profondément dans l'épaisseur du mur. Seule la petite face (bout) est vue en parement.
et compris le fil. Si l’angle est trop aigu, il l’écrase au marteau pour l’élargir et augmente la possibilité de plomber juste. Dégauchissant à l’oeil, il avive, toujours au marteau, l’arrête supérieure de la face de parement qui se placera en panneresse Panneresse Panneresse
Pierre dont la plus longue face est vue en parement dans le pan de mur.
.

Quauqu’un per m’ajudar ? a crié le maçon. La pierre est lourde, il faut la lever à deux. C’est le plus rigoureux et le plus expérimenté des compagnons qui achève la mise en place. Conjuguant l’effort des avant-bras à celui des jambes et du ventre, il la maintient faiblement soulevée et la pose sur l’assise d’attente. Quelques chocs précautionneux la font glisser "à la demande".

La voici posée sur la couche de mortier de tuf gras ou de chaux ; elle est frappée lentement : les assises de pose se rencontrent, le mortier reflue ; elle est calée provisoirement, son aplomb est vérifié sur elle-même puis le carré placé contre l’angle de l’arrête choisie, le plomb descend et affleure d’abord la base du mur et, en montant, les autres assises.




Une main sur le dos de la pierre, le maçon, de l’autre main, cale de l’intérieur l’encoignure puis il pousse de fins éclats, plats ou triangulaires, entre lit d’attente et lit de pose. La pierre est encore fragile, il lui faut son accompagnement de part et d’autre.


Les pierres d'encoignures de gneiss schisteux ne sont jamais placées lit debout, les feuillets tendant à s’écraser sous la pression. Elles sont de formes diverses, elle se trouvent croisées, finement calées, se chevauchant dans la chaîne d’angle. Dans la maçonnerie de l’angle rentrant, harpes et déharpes Harpe Harpe, déharpe
Harpe : nom donné à une pierre qui fait saillie et sort du mur. C'est un crochet servant à agrafer le mur à construire.

La déharpe est le contraire : c'est un vide laissé en attente.

En maçonnerie, le harpage est un procédé de liaison.
sont rigoureusement inversées.

La construction s’élève, entre deux encoignures, par assises horizontales et régulières de gneiss et micaschistes, posés à plat, très serrés. Un liaisonnement attentif ne permet à aucun moment la superposition de joints verticaux.




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