Tout pays limousin est aux confins d’un autre pays limousin ; ces confins sont le fruit de l’histoire très lointaine des mouvements géologiques. Il y a bien un coeur de pays où la pierre est la même mais, très vite, à peu de distance, les variations s’annoncent, les changements se lisent sur les maisons, de village en village.
Les façades prennent vie de roches mêlées, de pierres différentes, mariées dans la texture des murs. Née sur place, du substrat local, la maçonnerie est subtilement diverse, d’homogénéité apparente. Les maisons de pays font avoisiner pacifiquement des différences, des transitions, des interpénétrations géologiques.
Les appareillages obéissent au débit de la pierre structurée en grains ou en feuillets. Les jeux des formes et des teintes introduisent par eux-mêmes un mouvement, une âme.
Il en va tout autrement pour les maisons de notre époque, nées sous des lampes de bureaux : elles offrent des visages insensibles et inertes.
Ainsi, habitants et créateurs de faux rustique s’ingénient-ils à les décorer artificiellement de pendeloques fleuries, de ferronneries rapportées, de défroques paysannes. Aucune alliance, aucune harmonie... Pourquoi ne trouve-t-on sur aucun mur de pavillon une simple treille autre plante grimpante ?
Le maçon, ici, assise schistes et galets en bandes horizontales alternées ; non loin de là, briques et galets (Argentat, Beaulieu, Xaintrie), granite aux encoignures, micaschistes en plein mur.
Dans les hautes vallées périgourdines de géologie limousine, pierres de taille de calcaire jurassique jaune et gneiss lités bruns ou gris de St-Yrieix.
Dans les terroirs de sous-sol métamorphique, le quartz indissoluble est resté, après les érosions, sous la forme de multiples « cailloux » de diverses grosseurs dans les couches de surface, ou fruit des épierrages antérieurs ; on les retrouve disposés en toute liberté et sans affectation dans les parements de murs. Au milieu des petits moellons de gneiss, ces quartz blancs semblent regarder le village de leurs larges faces blanches et lisses.
Voici, aux confins de l’Auvergne, le basalte volcanique et le granite et vers Pierre-Buffière, le granite et la diorite. Voici, ailleurs, des constructions du Confolentais mêlant granite
Lors du plissement géologique hercynien, le magma, qui a migré vers la croûte terrestre et se fige lentement par cristallisation en profondeur, donne des roches grenues, les granites. Incandescent et épaississant, il transforme totalement les roches qu’il rencontre dans son voisinage.
, gneiss
Roche métamorphique, composée de feldspath, de quartz, de mica et d'éléments variables. (petit ROBERT1)
et calcaire, brèche d’impactite
Il s'agit ici de brèche volcanique, composée de fragments de roches magmatiques et d'un ciment de cendres.
et granite, à Rochechouart. Grès
Roche sédimentaire composée de grains siliceux agglomérés par un ciment naturel.
et calcaire ardoisier de Travassac. Brèche et calcaire…
Les mises en œuvre sont franches, sans idée préconçue, sans préjugés sur quelque pierre que ce soit : on emploie judicieusement le matériau qui est sous la main.
Il en est de même pour les pierres provenant manifestement de constructions antérieures. Le réemploi est permanent depuis longtemps et pratiqué avec hardiesse : bien souvent, on ne tient aucun compte des moulures primitives. La pierre est une pierre, c’est tout ! Ces réemplois sont visibles en pays de pierre de taille, invisibles ailleurs.